Marcel Salem a coupé ses dreads mais n'a pas perdu son amour du reggae. Le chanteur sénégalais nous offre un troisième effort plus roots que jamais et aiguisé comme une lame. Intitulé Les charognards, l'album dénonce les systèmes politiques dynastiques et pointe du doigt l’injustice envers les populations pauvres d’Afrique.
Celui que l'on surnomme liga thiaw (littéralement « le muet ») au Sénégal, n'a prononcé ses premiers mots qu'à l'âge de sept ans et s'est bien rattrapé depuis ! Dans son dialecte qu'il aime tant, le Sérère, Marcel appelle à l'éveil de son continent en s'attaquant aux puissants sans remord comme sur le très bon titre éponyme. Sur le pêchu Leeb, il dénonce la guerre employeurs/employés où les seconds plient souvent sous le pouvoir des premiers. Le Sénégalais s'attaque aussi à l'hypocrisie, aux mensonges (Puukereh) et à leur incarnation comme avec Irak où il s'offusque de l'hégémonie de la famille Bush.
Marcel Salem chante le monde mais c'est peut-être lorsqu'il parle de ses racines qu'il est le plus pertinent et touchant. Il se considère fils de la terre, comme tout bon Sérère qui se respecte. Petit, il creuse, fouille, bêche, sème et récolte et c'est ce monde rural et traditionnel qu'il chante aujourd'hui si bien. Que ce soit la revente des terres agricoles pour quelques sous avec Pasoob Fa, la famine avec Yaabi Ndout, ou la préservation de la culture Sérère sur le très beau Weni Serrel, le chanteur aborde des enjeux cruciaux qui ne laissent pas insensible.
Affûté comme jamais, Marcel Salem appuie là où ça fait mal avec ce savoir-faire africain inimitable où les mélodies viennent embellir les constats amères. Le reggae Made in Africa a encore de beaux jours devant lui !
Tracklist :
1 Mayama sama baat
2 Woula
3 Cuja'a
4 Maman ça suffit
5 Les charognards
6 Pasoob Fa
7 Leeb
8 Irak
9 Yaabi Ndout
10 Puukereh
11 Weni Sereel
12 Guereem
chronique Reggae africain 11
