« Fais-toi une arche de bois de gopher. Entre dans l’arche. Tu prendras auprès de toi les 8 meilleurs musiciens de reggae moderne. » Harrison Stafford exécuta ce que les Dieux de la musique lui avaient ordonné, et voilà le nouvel album de Groundation : « Building An Ark ». Dix morceaux, parfois surprenants, à la qualité indéniable. La première surprise réside dans l’intro... piano voix. On pense à John Lennon, à Elton John, mais pas à Groundation. Puis, on entre brusquement dans le premier morceau, « Bulding An Ark », définitivement reggae. On est bousculé mais pas déçu ! Le ton est donné ; les Californiens ont mis la barre très haute pour ce dixième effort. Pas d’invité de marque, mais du Groundation à l’état pur. Comme sur le précédent album « Here I Am », Kerry Ann Morgan et Kim Pommell sont très présentes, à l’image des titres « Payaka Way », « Wo Is Gonna » ou « Keep It Up ». Harrison Stafford triture toujours plus sa voix. Il termine « Payaka Way » en donnant l’impression d’être en sanglot sur ce titre qui dénonce le système barbare dans lequel nous vivons (« Payaka » signifie « barbare », « sauvage » ou « païen » en jamaïcain). Les dix titres de l’album véhiculent pourtant une vibes positive et optimiste en prônant l’éducation et la connaissance. La part belle est aussi faite aux musiciens qui montrent l’étendue de leur talent sur de longs solos qui semblent être improvisés tout en étant totalement maîtrisés. On retiendra les nombreux solos groovies de Marcus Urani au clavier et l’énorme prestation de David Chanere à la trompette sur « Keep It Up », qui incarne le mélange parfait entre jazz et reggae. On note également certains arrangements façon dub, comme sur « Merry-Go-Round ». « The Dreamer » est un véritable bijou. Une atmosphère posée, un son lourd et une voix retentissante. « Who Is Gonna » s’achève sur une ambiance groundation, ces rassemblements rastas où l’on joue du tambour en chantant et priant. Et « Daniel » offre une mélodie frappante en racontant l’histoire de ce personnage biblique. Chaque titre révèle une surprise. Et l’album termine comme il avait commencé : avec une courte outro piano voix, agrémentée d’une guitare acoustique. Comme tout album de Groundation qui se respecte, « Building An Ark » mérite plusieurs écoutes avant de pouvoir en apprécier toutes les subtilités. Mais une fois qu’on est initié, on ne peut plus s’en passer... Pas sûr que l’album convainque les Groundation-sceptiques, mais sûr que les fans seront comblés. Le combo américain signe là un de ses albums les plus aboutis.