La musique sous silence
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La musique sous silence

16 Février 2021

Fin janvier nous relayions ici même un appel à la manifestation lancé par les différents comités de soutien aux inculpés de la Maskarade (fête libre qui a eu lieu à Lieuron en Bretagne pour le nouvel an), soutenus par La Coordination Nationale des Sons. Plus fort encore, un appel aux sound systems avait été réalisé afin que tous les collectifs, associations et artistes de la fête libre puissent porter haut et fort les revendications de ce mouvement, lequel s'est depuis joint aux revendications de la coordination Stop Loi Sécurité Globale.

Depuis ces différents appels à soutien et manifestation, le mouvement tire la sonnette d'alarme dans un communiqué que nous reproduisons ci-dessous, signé par les comités de soutien aux inculpés de la Maskarade et la Coordination Nationale des Sons. En effet, nombre d'arrêtés préfectoraux freinent ou empêchent la mobilisation et les manifestations.

Dans ce contexte amplifié par l'absence de perspectives et de réouverture des lieux de diffusion musicale et lieux culturels en général, ce communiqué rappelle le droit de chacun de défendre ses droits, dénonce des décisions administratives à deux vitesses et discriminantes et se souvient du rôle de la musique et de la culture dans les avancées sociales. 

A bon entendeur !


"LA MUSIQUE SOUS SILENCE
Le 2 janvier, Tristan est incarcéré, soupçonné d'avoir organisé une fête pour le nouvel an. Dans les jours qui suivent 8 autres participant.es seront arrêté.es et menacé.es également de peines allant jusqu'à 10 ans de prison. 9 personnes accusées sans preuves et sous des chefs d'inculpation fallacieux qui ne tiendront jamais devant un tribunal.

De nombreuses voix s'élèveront en réaction et des comités de soutien se forment un peu partout.

 

Le 9 janvier, une première manifestation de soutien aux inculpé.es de la Maskarade est interdite à Rennes.
Le 16 janvier des dizaines de milliers de personnes manifestent en dansant dans près de 50 villes de France, contre la répression de la jeunesse et de la culture, à la mémoire de Steve et contre la loi sécurité globale. À Paris 17 chars sont empêchés de manifester et accusés d'agression sonore. À Limoges, à Toulon et à Montpellier, les chars sont saisis après la manifestation. Dans ces 4 villes, les autorités locales furent obligées de rendre le matériel, faute de justification légale.

 

Le 20 janvier, dans le cadre de l'enquête sur Lieuron, le procureur Philippe Astruc ordonne la saisie du matériel d'un grand nombre de sound systems locaux, regroupé dans un hangar, sans même accuser aucun des propriétaires de quelque infraction que ce soit. Face à la pression qui s'accentue, cas rarissime, il fait libérer Tristan le 22 janvier.

 

Le 23 janvier, à Rennes, le préfet accuse les chars de vouloir organiser une rave party. Du matériel est saisi et les manifestant.es violemment dispersé.es.
Le 30 janvier près d'une dizaine de villes interdiront les chars. Malgré cela la mobilisation s'amplifie dans plus de 30 autres villes avec des cortèges festifs mais déterminés. Le comité de soutien de Bourgogne, soutenu par la LDH et la CGT, a réussi à déposer un recours à temps devant les tribunaux, qui ont bien évidemment donné raison aux manifestant.es.

 

Ce samedi 13 février, un appel national a de nouveau été lancé par les comités de soutien aux inculpés de la Maskarade et par la Coordination Nationale des Sons. Un déluge d'arrêtés préfectoraux s'est alors abattu sur la mobilisation. La plupart au dernier moment pour empêcher la possibilité de les contester. 3 préfectures ont même interdit toute musique amplifiée dans la rue sur plusieurs semaines. Comprenant également les enceintes Bluetooth, les radios des échoppes, les hautparleurs municipaux...
À Paris, le préfet a décrété que seul 2 chars pourraient accéder et que le volume sonore serait limité à 81 décibels sur les aigus. Ce qui correspond au volume sonore de la voix humaine. Un cri d'adulte est à 95dB. 110 pour un bébé. Pourtant ce même préfet a autorisé le 17 janvier une immense scène de concert place du Trocadéro, contre la PMA.
Une vingtaine de villes ont réussi à faire valoir leur droit à manifester. Un jugement est en attente pour Rennes.

 

Les représentants de l'État ainsi que certains médias tentent de faire croire que ces rassemblements ne seraient que pures fêtes sans revendications, réduisant ainsi au statut de fêtard.es des personnes revendiquant leurs droits. Nous dénonçons ces attaques illégitimes dont le but est d'empêcher toute contestation et de discréditer la jeunesse et la culture en dépolitisant leur mobilisation.

 

Dans toute l’ère moderne, la plupart des grands courants musicaux ont été l'expression d'un profond désir de vie et justice sociale. Le jazz, le rock’n’roll, le blues, le punk, le hip-hop puis la techno. Tous furent durement réprimées.
Les fêtes libres version techno sont arrivées en France via l’Angleterre, importées par des organisateurices expulsé.es de leur propre pays. Justement parce que les sound systems avaient envahis les rues pour protester contre les politiques de Thatcher. Le gouvernement leur fit un procès, historique car il fut l’un des plus longs et des plus couteux. Ils furent pourtant acquittés mais des lois vinrent alors interdire les rassemblements sur de la musique répétitive.

 

Il est donc tout à fait logique que ce soit autour de ces sound-systems que la mobilisation actuelle s’organise, rejointe par toute une partie de la jeunesse et de la culture. Pour lutter et se faire entendre contre un gouvernement sourd à leur détresse, quoi de mieux que de puissantes enceintes ?
Elles portent loin notre message à travers les villes, font sortir à leurs balcons les habitant.es et redonnent de la vie à des rues moribondes.

 

L’énergie collective nait de la musique car elle est universelle et millénaire. Toute personne ressent une émotion à l’écoute d’une musique. Elle est souvent utilisée à des fins thérapeutiques.
La musique a toujours fait partie des manifestations. Elle est un moyen d'expression souvent bien plus puissant que les mots. C'est alors une forme de résistance festive. Ainsi, nous dansons contre le sacrifice de la jeunesse et de la culture et contre les politiques sécuritaires.

 

Alors, contrairement à ce que certain.es voudraient nous faire croire, cette mobilisation n'est pas une rave géante. C'est peut-être même une petite ravolution !

 

Les comités de soutien aux inculpés de la Maskarade
La Coordination Nationale des Sons"

 

Par Reggae.fr, Photo Unsplash Jason Rosewell
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