Artiste reggae conscient s’il en est, Yaniss Odua est de retour - cinq ans après « Nouvelle Donne » - avec un album de toute première qualité intitulé « Stay High » (Caandun Music, dispo ici). Accompagné dans cette nouvelle aventure par ses complices Kahifa et Ayema à la programmation de la majorité des riddims, par le légendaire producteur jamaïcain Clive Hunt aux arrangements, mais aussi par Fred N’Landu, Wiya Campbell, Shane Brown & El Speaker au mix, Yaniss Odua propose 14 titres de nouveau Reggae, qu’il définit comme « Futu’Roots », alliant ainsi les premières influences Reggae Dancehall de l'artiste avec des sonorités digitales contemporaines subtilement orchestrées et ancrant totalement l’opus dans son époque.
L’histoire de la réalisation de « Stay High » a débuté en 2019, et elle s’est poursuivie pendant les longs mois de la pandémie qui a touché le monde entier, inspirant d’autant plus un projet éclectique et ambitieux.
« Black Miror », au rythme enivrant, aux sonorités sauvages et naturelles, fait partie de ces morceaux qui symbolisent l’album. Yaniss Odua y délivre des textes très bien sentis traitant d’un éventuel retour à la nature. Il convient à cet égard de saluer le travail de Tibz M (déjà à la plume sur « Refugee » et « Ecoutez-Nous » sur le précédent album), qui a collaboré sur les lyrics de quasiment tout l’opus.
Proche de Yaniss depuis plusieurs années, Flavia Coelho vient partager le morceau inspiré hip hop avec « Embala La ». L’ambiance western moderne de « Papiers », et la nonchalance du flow sont séduisants à souhait.
Rien à dire sur « Faut-il encore des preuves » feat. Dub Inc. Ce titre constatant l’état actuel de la planète est efficace et la collaboration sonne comme une évidence. Yaniss délivre un message d’unité sur « Enfants du monde », que Danakil (représenté par les chanteurs français Balik et sénégalais Natty Jean) embrasse et illustre pleinement sur un morceau ska. Le digital s’invite de nouveau pleinement sur l’ovni « Ready Now » featuring Kiki Lion, ou Yaniss livre - une fois n’est pas coutume - une démonstration de fast style bien menée. Mi rap mi dub, accrochez-vous !
On apprécie le reggae roots de « Kité Yo Palé », le caractère dansant de « Lioness » et on défie quiconque de ne pas se déhancher sur « Jah Knows » featuring le Mwaka Boss Kalash (un hit en puissance qu’on espère entendre prochainement à la radio).
L’artiste ghanéen Kelvyn Boy fait entendre sa voix cristalline sur le titre éponyme. À l’aide d’un melodica entêtant, « Stay high » aspire littéralement l’auditeur dans univers musical crossover de haute volée. On touche là totalement le caractère Futu’Roots du projet.
On avoue enfin être particulièrement touché par les morceaux les plus intimistes de l’album, comme « Viser l’Horizon », « Destinée » et « Qui vivra verra », où Yaniss rappelle son parcours, ses choix, et l’état d’esprit de combattant qui ne l’a jamais quitté.
L’album se clôt parfaitement avec « Allez », où Yaniss livre, sur un rythme lourd inspiré dub, le message le plus utopique qui soit et bienvenu dans le contexte mondial actuel. « Stay High » s’inscrit pleinement dans l’ère du temps, un Reggae fidèle à ses valeurs d’origine mêlé à une texture digitale pleinement assumée.
Sans doute l’un des meilleurs albums de Yaniss Odua. Rendez-vous le 9 juin au Cabaret Sauvage à Paris pour fêter ça.