Plusieurs fois avorté, le film documentaire officiel sur la vie de Bob Marley, co-produit par Ziggy Marley et Chris Blackwell , voit enfin le jour. Sorti le 21 avril aux Etats-Unis, "Marley The Definitive Story " sera le 13 juin sur les écrans français. Après les tentatives échouées de Martin Scorses et Jonathan Demme – c’est finalement Kevin Macdonald (« Le dernier roi d’Ecosse » ou « Un jour en septembre «) qui réussit l’exercice. Il le réussit en effet, dans la mesure où sa tache n’a pas du être facile : il fallait à la fois répondre aux exigences de la famille Marley, qui avait certainement, et cela peut se comprendre, l'envie de poser certaines choses sur un support qui fera trace et respecter l’obligation, nous le supposons, de dépeindre un portrait sinon objectif, au moins avec un parti pris qui serait personnel au réalisateur et assumé.
Les connaisseurs n’apprendront pas énormément de choses dans ce documentaire, le réalisateur ayant clairement décidé de raconter la légende. Mais il nuance quand même son portrait par l'intervention de personnages tels que Bunny Wailer, lequel raconte sa vision, des anecdotes intéressantes et son point de vue sur le début de l’histoire des Wailers (composés à l’origine de Peter Tosh, Bob Marley et lui-même, dont il demeure donc le seul vivant). Rappelons toutefois que Bunny avait d'abord réclamé un million de dollars pour participer au film, ce qui a été refusé. Kevin MacDonald affirme qu'il y intervient finalement gratuitement, mais nous notons qu’il a cependant la qualité de producteur associé .... Par ailleurs , l'intervention de Chris Blackwell et son influence capitale sur le succès international de Bob Marley ne contribue pas toujours à embellir la légende contée. Son intention mercantile de faire de la musique de Bob un mouvement soutenu par le public blanc américain, et l'acceptation de cette stratégie par Bob et Rita peut en effet paraître contraire à ce que prônait justement l'artiste (même si comme montré dans le film, il s'attachera ensuite à se rapprocher du continent africain et a toujours soutenu les gens autour de lui et distribué sa richesse à son quartier). Des témoignages encore jamais ou rarement mis au jour, tels que ceux de la demi-sœur de Bob Marley, son cousin, Cindy Breakspeare, la mère de Damian, ou encore Pascaline Bongo, la fille de l’ancien président Gabonais qui était, elle aussi, tombée amoureuse de Bob Marley, constituent des interventions également très intéressantes. Les réflexions tout au long du film de Neville Garrick, ancien directeur artistique des Wailers, sont aussi contributives. L'émotion est également au rendez-vous avec les interviews de Ziggy et sa sœur Cedella sur les infidélités de leur père, la souffrance de leur mère et la perte de cette figure paternelle mythique.
Côté musical, et c’est bien ce qui nous intéresse le plus, on ne se lasse pas d’entendre les titres mythiques retraçant la carrière des Wailers et de Bob Marley. De « Judge not », en passant par « Simmer down », Work », « Trenchtown rock » (live au Roxy Theatre) ou encore l’impressionnante et quasi mystique performance de Bob à l’occasion du One Love Peace Concert de 1978, à l’occasion duquel il rassembla les mains des deux ennemies politiciens Edward Seaga et Michael Manley, sont autant de sons qui demeurent en nous après l’écoute de la bande originale du film. D’autres morceaux proposés dans leur version live tels que « War », « No woman no cry » ou encore « I shot the sheriff » valent évidemment la peine. La tracklist du double album de la bande originale du film respecte la chronologie de ce dernier avec les principaux titres de la carrière du Tuff Gong, en incluant notamment les extraits live ci-dessus cités.
En conclusion, soit ce film contribuera à la diffusion des clichés sur la musique reggae représentée par des rastas fumeurs de joints à la démarche nonchalante, soit, et c’est bien la raison pour laquelle nous pensons qu'il faille le soutenir, il apportera Bob Marley et la musique reggae aux jeunes générations composant le grand public et les grands médias, lesquels se décideront peut être à s'y intéresser davantage ? Dans tous les cas, ce documentaire et sa bande originale constitueront à présent des références pour ces derniers.
Le film dure par ailleurs près de 2 h 30 qu'on ne voit absolument pas passer tant les images sont belles et la musique, même déjà connue, toujours aussi agréable à entendre.
À voir au cinoche le 13 juin. La bande originale est quant à elle déjà dans les bacs!
Tracklist :
CD1
1-Corner Stone
2-Judge Not
3-Simmer Down
4-Small Axe
5-Mellow Mood
6-Stir It Up
7-Concrete Jungle
8-Crazy Baldheads
9-Natty Dread
10-Trenchtown Rock (Live at the Roxy Theatre)
11-Get Up Stand Up
12-Work
CD2
1-Jammin (Live at One Love Peace Concert)
2-Exodus Dub (Kindred Spirit Dub Mix)
3-No Woman, No Cry (Live at the Lyceum Show)
4-War (Live! At the Rainbow)
5-I Shot the Sheriff (Live from the Lyceum)
6-Roots Rock Reggae
7-Three Little Birds
8-Real Situation
9-Could You Be Loved
10-One Love / People Get Ready
11-Redemption Song
12-High Tide, Low Tide