On l'attendait avec impatience... On avait presque fini par perdre espoir, mais le projet Inna De Yard - initié en 2004 par feu le label Makasound - renaît de ses cendres chez Chapter Two Records. Même si le virulent guitariste Earl Chinna Smith ne fait plus partie de l'aventure, le concept reste le même : enregistrer des bijoux de la musique jamaïcaine en versions acoustiques en plein air. Un joli collectif s'est donc rassemblé sur la terrasse d'une maison dans les collines de Kingston pour pondre ce nouvel album, The Soul of Jamaica, en à peine quatre jours.
Quelques anciens présents dès les débuts de l'aventure sont encore de la partie, comme le mystique Kiddus I, l'excentrique Cedric Myton ou le jeune talent Derajah. Une team de premier choix renforcée par de nouveaux éléments non moins légendaires : Ken Boothe, Winston Mc Anuff ou encore Lloyd Parks. On imagine le casting de l'équipe réalisé au hasard des passages de chacun sur les lieux de l'enregistrement. C'est ainsi qu'on découvre même quelques surprises comme Stephen Newland, chanteur de Rootz Underground (dont les nouvelles se font rares), le jeune Var, inconnu au bataillon, et même le guitariste Bo-Pee qui pousse la chansonnette sur Thanks and Praises, l'un des titres les plus doux de cette tracklist où les percussions et la basse s'absentent pour nous laisser apprécier pleinement le texte spirituel de Bo-Pee.
Les Viceroys se chargent d'ouvrir l'album avec le délicieux Love is the Key à l'émotion palpable. Le trio vocal est aussi responsable des chœurs de certains titres. C'est aussi ça la magie Inna De Yard : la force du collectif, la beauté des rencontres et la spontanéité du moment. On les retrouve notamment derrière Ken Boothe dont la voix nous colle toujours autant de frissons lorsqu'il réinterprète le rocksteady Let the Water Run Dry ainsi que son classique de toujours Artibella.
Le bassiste Lloyd Parks a lui aussi droit à deux tunes, le terrible Slaving et le moins connu Money for Jam. Les percussions impriment chaque titre dans les oreilles de l'auditeur et les quelques cuivres subtilement placés embellissent des mélodies déjà rondes à souhait, notamment lorsque Kush McAnuff revisite Black to I Roots de son groupe The Uprising Roots. Son père nous dévoile quant à lui un épatant Secret, un titre aux couleurs soul que les aficionados avaient déjà découvert sur l'album Diary of the Silent Years sorti par Makasound. Le tune Stone figurait également sur cette belle sortie de 2002, la première du label français, mais cette fois ce n'est pas Winston qui s'y colle, mais Derajah qui n'hésite pas à rajouter un couplet signé de sa main.
L'alchimie Inna De Yard est intacte ! Le collectif parvient à nouveau à communiquer cette âme qui hante la musique jamaïcaine depuis des décennies pour notre plus grand plaisir. La simplicité des arrangements – qu'ils soient joués au piano, aux cuivres ou à l'accordéon – ne vient pas perturber l'authenticité des morceaux et bien que l'on ne ressente plus autant l'innocence et l'impulsivité des premiers volumes, lorsque Chinna était encore aux commandes, on a largement gagné en qualité sonore ! Le yard n'est plus le même, mais son esprit a magistralement survécu.
Tracklist :
01. Love Is the Key feat. The Viceroys
02. Let The Water Run Dry feat. Ken Boothe
03. Slaving feat. Lloyd Parks
04. Black To I Roots feat. Winston McAnuff
05. Youthman feat. Cedric Myton
06. Crime feat. Var
07. Jah Power, Jah Glory feat. Kiddus I
08. Artibella feat. Ken Boothe
09. Sign of the Times feat. Steve Newland
10. Secret feat. Winston McAnuff
11. Stone feat. Derajah
12. Money for Jam feat. Lloyd Parks
13. Thanks & Praises feat. Bo-Pee