« No, no, no…You can test
Rodigan no more…». Le refrain résonne encore dans les têtes des quelque 350 personnes venues à la soirée, organisée à Vieux la romaine, samedi 20 janvier. Dans cette petite bourgade du Calvados, la venue de David
Rodigan constitue un véritable événement. Le Britannique, âgé de 53 ans, est connu dans le monde entier pour être un des plus grands collectionneurs et sélecteurs de reggae.
Deux associations sont à l’initiative de cette soirée : « Utopistes Anonymes », avec la collaboration de « Maka Production ». Pour l’occasion, les organisateurs ont mis les petits plats dans les grands, puisque deux de murs de son, assez impressionnants, s’élèvent dans la salle : la sono artisanale de Dub Livity, de huit kilos watts…Vive les basses !
En attendant
Rodigan, la première partie de soirée est assurée, par Dub Livity et Dem A Come. Se relayant aux platines toutes les trente minutes, les deux sound systems jouent une sélection roots/new roots, qui a le mérite de mettre le public dans le bain. Après environ deux heures de « warm up », place aux chanteurs de la scène reggae caennaise, qui se passent le micro tour à tour. Avec sa belle voix, la nouvelle venue, Systa Goldfinger, fait une bonne impression. Jhml et Schultz, deux MC-chanteurs faisant respectivement partie du Dem A Come et du Dub Livity sound, s’illustrent également sur des riddims new roots. Un autre artiste local, Raïa, ravit la foule par sa superbe interprétation du Season riddim, avant l’arrivée de la star de la soirée.
Rodigan charmé par l’ambiance conviviale
Lorsque David
Rodigan arrive, certains sont surpris de découvrir le look ordinaire de ce quinquagénaire : blanc, chauve, portant des lunettes, une chemise bleu et une serviette blanche sur l’épaule, le célèbre sélecteur semble bien loin des clichés du reggae…
Le Londonien semble charmé par l’ambiance conviviale de la soirée, puisque, face au public qui l’entoure, il annonce : « Cela faisait longtemps que je ne suis pas arriver dans un son en ressentant cela » !
Le «
Rodigan show » démarre. « Ram Jam », comme on le surnomme, revisite l’histoire de la musique reggae. Sa sélection ne remonte pas le temps de façon linéaire : le Britannique préfère alterner toutes les périodes et tous les styles du reggae. En désordre, tout y passe : du roots originel de Studio One, à celui de
Johnny Osbourne et des
Skatalites, aux débuts du dancehall (Supercat et Papa San), en passant par le plus actuel (
Bounty Killer,
Capleton,
Shabba Ranks, T.O.K.), sans oublier le new roots, incarné par
Jah Mason,
Sizzla,
Bushman ou
Richie Spice, qui signe un morceau énorme avec « Marijuana ». Le tout en dub plate, bien sûr…
Sur le morceau « World A reggae Music » d’Ini Kamoze,
Rodigan, visiblement très en forme, n’hésite pas à monter sur le banc situé derrière lui pour saluer et exhorter le public. « Pull Up ! ». La ferveur monte…Et explose lors du « Welcome To Jamrock » de Junior Marley. Puis,
Bounty Killer revient beaucoup, mais le public en connaisseur, veut du roots. S’en suit donc un passage plus calme consacré à Toots, avec une magnifique reprise du premier hit de Ray Charles « I Got A Woman ».
Dub Plate de Bob
Mixant autant avec des vynils qu’avec des cds,
Rodigan agrémente son show d’informations sur chacune de ses dub plates : il explique au public intéressé la provenance d’une chanson, son auteur, le contexte...Ainsi a lieu un hommage aux regrettés
King Tubby, avec un dub planant, et Desmond Decker, avec « Shanty Town » de 1967 ou « Israelites » de 1969.
Pour finir, pendant trente minutes, le Britannique revisite les meilleurs compositions de
Bob Marley. Son coup de génie ? Avoir ajouté la voix de
Capleton, qui chante « Jah Jah City », à celle de Bob, sur la mythique « War ». Il fallait y penser ! Puis vient la cerise sur le gâteau : la dub plate de Marley, qui est en fait un acapella de « Iron Lion Zion », superposé sur le Cuss Cuss riddim, par
Rodigan, l’unique détenteur de ce morceau. La portée historique de ce morceau original suffit pour transcender le public.
Pendant plus de quatre heures, David
Rodigan a donc exposer sa fabuleuse collection, commencée il y a plus de trente ans. Le public, fatigué par plus de six heures de show, finit sur les rotules, mais des refrains pleins la tête...Comme
Rodigan, visiblement enchanté de cette soirée. David, tu reviens quand tu veux !